Le 27 août dernier, dans un entretien à l’agence Reuters, l’évêque émérite du diocèse de Hongkong, le cardinal Zen Ze-kiun, a mis en garde les autorités de Hongkong contre les dangers qu’il y aurait pour elles à ne pas prendre en compte la demande populaire d’instaurer le suffrage universel lors des élections à venir de 2017. Il a précisé qu’il se tenait prêt à rejoindre Occupy Central, le mouvement civique qui appelle à une occupation pacifique du centre financier de Hongkong en juillet 2014 pour obtenir le suffrage universel, et qu’il ne craignait pas une éventuelle arrestation par la police à cette occasion.
Agé de 81 ans, évêque du diocèse catholique de Hongkong jusqu’en 2009, le cardinal Zen est un avocat de longue date des droits politiques réclamés par une portion de plus en plus importante de la population de Hongkong, et notamment de l’instauration d’une démocratie politique fondée sur le suffrage universel comme le prévoyaient les accords sur le retour de Hongkong sous le drapeau chinois. Pourtant, dans cet entretien du 27 août, le cardinal se montre pessimiste quant à la perspective de voir instauré le suffrage universel à Hongkong, et notamment en 2017, date prévue pour les prochaines élections de l’exécutif local. Il estime même que le gouvernement hongkongais et les partisans de Pékin pourraient tabler sur d’éventuelles violences de la part des militants pro-démocratie pour autoriser le recours à la répression et justifier à nouveau le report sine die du suffrage universel afin de choisir le chef de l’exécutif ou les députés du Parlement local. « Oui, il se peut qu’ils suscitent des violences et même qu’ils infiltrent le mouvement [Occupy Central]. Ce danger existe. Je crains qu’ils ne finissent par recourir à la violence et disposent ainsi d’un prétexte pour tout écraser », s’inquiète Mgr Zen.
Les propos du cardinal interviennent dans un contexte passablement tendu où l’affrontement entre les pro-Pékin d’un côté et les partisans de la démocratie politique de l’autre se fait de plus en plus vif.
Le 1er juillet dernier, date anniversaire de la rétrocession de Hongkong à la Chine (1997), la traditionnelle marche des milieux pro-démocratie, en marge des commémorations officielles, a réuni la foule considérable de 430 000 personnes (sachant que Hongkong compte sept millions d’habitants), malgré une pluie battante. Outre les frustrations liées à la collusion entre les milieux d’affaires et le gouvernement, celles liées à l’écart grandissant entre les pauvres et les riches, celles dues au coût exorbitant du logement, les manifestants affirmaient clairement qu’ils avaient suffisamment attendu pour voir encore repoussée l’introduction du suffrage universel dans le système politique.
Dans la continuation de cette mobilisation populaire, deux professeurs d’université et un pasteur protestant ont lancé le mouvement Occupy Central, en prenant modèle sur le mouvement de protestation pacifique Occupy Wall Street né en 2011 à New York. Les protagonistes d’Occupy Central promettent de bloquer le quartier de Central, cœur de la place financière qu’est Hongkong en Asie, en juillet 2014, en y organisant des manifestations pacifiques et en appelant à la désobéissance civile. A l’évidence, les autorités locales voient d’un très mauvais œil ce mouvement qui risque de ternir l’image de stabilité et de tranquillité dont jouit Hongkong.
Dans la mobilisation tous azimuts qui agite aujourd’hui Hongkong, l’Eglise catholique n’est pas restée silencieuse. Le 25 juillet sur son site Internet, puis en Une des éditions anglaise et chinoise de son hebdomadaire, le diocèse de Hongkong a publié un « Appel urgent à l’action responsable et au dialogue sincère » au sujet « du suffrage universel et de la désobéissance civile ». Le diocèse y rappelle son engagement en faveur de l’introduction du suffrage universel dans les institutions politiques de Hongkong et reprend les arguments déjà développés dans la lettre ouverte au gouvernement publiée en février de l’année dernière. Mais, fait nouveau, l’appel ne rejette pas la perspective d’un recours à la désobéissance civile. « (…), si aucune réponse positive n’a été apportée à des appels persistants à corriger des injustices graves ou si aucun recours juridique n’est possible, ou bien encore si des structures politiques non démocratiques ne permettent pas un accès aux moyens normaux pour corriger ou réformer, des situations exceptionnelles font que, dans certaines limites, la ‘désobéissance civile’ est justifiée », peut-on lire dans ce texte.
Dans la conférence de presse qui a suivi la publication de cet appel, le P. Michael Yeung, vicaire général du diocèse, a insisté pour dire que l’Eglise ne faisait qu’appeler toutes les parties à « dialoguer » et qu’elle ne militait pas pour des actions de désobéissance civile, lesquelles risqueraient de « diviser la société ». Mais, pour ceux qui à Hongkong et à l’intérieur de l’Eglise doutaient de la volonté de l’actuel évêque du diocèse, Mgr John Tong Hon, de réaffirmer la nécessité d’une réforme politique à Hongkong, l’appel du 25 juillet montre que Mgr Tong « suit la voie ouverte par Mgr Zen » et que l’actuel évêque de Hongkong « redit avec force et détermination, même si c’est d’une manière plus discrète, plus prudente et plus nuancée, ce que disait son prédécesseur », confie à Eglises d’Asie un prêtre du diocèse.
Les partisans de Pékin ne s’y sont d’ailleurs pas trompés et plusieurs d’entre eux ont appelé Mgr Tong et le diocèse au silence. « Le territoire [de Hongkong] jouit de la liberté d’expression et de religion, mais un responsable religieux ne devrait pas, au motif de ‘se conformer aux enseignements de sa religion’, appeler ouvertement ses fidèles à rejoindre le mouvement Occupy Central et à enfreindre la loi », a commenté Wong Kwok-hing, de la Fédération des syndicats de Hongkong. L’Eglise « déforme les faits. Les gens doivent faire attention dans ce contexte où l’on voit l’atmosphère politique se radicaliser », a réagi Chan Kam-lam, de l’Alliance démocratique pour l’amélioration et le progrès de Hongkong, un parti pro-Pékin.
En réponse le P. Michael Yeung a simplement renvoyé ceux qui critiquent l’appel du 25 juillet au texte original, lequel, a-t-il souligné, s’appuie sur l’enseignement du Catéchisme de l’Eglise catholique. « L’appel ne se concentre pas sur le fait de savoir s’il faut ou non soutenir Occupy Central. L’Eglise a pour principe de ne pas intervenir en politique ; elle vise à promouvoir la valeur universelle que représente des élections démocratiques », a indiqué le vicaire général.
(Source: Eglises d’Asie, 29 août 2013)
Agé de 81 ans, évêque du diocèse catholique de Hongkong jusqu’en 2009, le cardinal Zen est un avocat de longue date des droits politiques réclamés par une portion de plus en plus importante de la population de Hongkong, et notamment de l’instauration d’une démocratie politique fondée sur le suffrage universel comme le prévoyaient les accords sur le retour de Hongkong sous le drapeau chinois. Pourtant, dans cet entretien du 27 août, le cardinal se montre pessimiste quant à la perspective de voir instauré le suffrage universel à Hongkong, et notamment en 2017, date prévue pour les prochaines élections de l’exécutif local. Il estime même que le gouvernement hongkongais et les partisans de Pékin pourraient tabler sur d’éventuelles violences de la part des militants pro-démocratie pour autoriser le recours à la répression et justifier à nouveau le report sine die du suffrage universel afin de choisir le chef de l’exécutif ou les députés du Parlement local. « Oui, il se peut qu’ils suscitent des violences et même qu’ils infiltrent le mouvement [Occupy Central]. Ce danger existe. Je crains qu’ils ne finissent par recourir à la violence et disposent ainsi d’un prétexte pour tout écraser », s’inquiète Mgr Zen.
Les propos du cardinal interviennent dans un contexte passablement tendu où l’affrontement entre les pro-Pékin d’un côté et les partisans de la démocratie politique de l’autre se fait de plus en plus vif.
Le 1er juillet dernier, date anniversaire de la rétrocession de Hongkong à la Chine (1997), la traditionnelle marche des milieux pro-démocratie, en marge des commémorations officielles, a réuni la foule considérable de 430 000 personnes (sachant que Hongkong compte sept millions d’habitants), malgré une pluie battante. Outre les frustrations liées à la collusion entre les milieux d’affaires et le gouvernement, celles liées à l’écart grandissant entre les pauvres et les riches, celles dues au coût exorbitant du logement, les manifestants affirmaient clairement qu’ils avaient suffisamment attendu pour voir encore repoussée l’introduction du suffrage universel dans le système politique.
Dans la continuation de cette mobilisation populaire, deux professeurs d’université et un pasteur protestant ont lancé le mouvement Occupy Central, en prenant modèle sur le mouvement de protestation pacifique Occupy Wall Street né en 2011 à New York. Les protagonistes d’Occupy Central promettent de bloquer le quartier de Central, cœur de la place financière qu’est Hongkong en Asie, en juillet 2014, en y organisant des manifestations pacifiques et en appelant à la désobéissance civile. A l’évidence, les autorités locales voient d’un très mauvais œil ce mouvement qui risque de ternir l’image de stabilité et de tranquillité dont jouit Hongkong.
Dans la mobilisation tous azimuts qui agite aujourd’hui Hongkong, l’Eglise catholique n’est pas restée silencieuse. Le 25 juillet sur son site Internet, puis en Une des éditions anglaise et chinoise de son hebdomadaire, le diocèse de Hongkong a publié un « Appel urgent à l’action responsable et au dialogue sincère » au sujet « du suffrage universel et de la désobéissance civile ». Le diocèse y rappelle son engagement en faveur de l’introduction du suffrage universel dans les institutions politiques de Hongkong et reprend les arguments déjà développés dans la lettre ouverte au gouvernement publiée en février de l’année dernière. Mais, fait nouveau, l’appel ne rejette pas la perspective d’un recours à la désobéissance civile. « (…), si aucune réponse positive n’a été apportée à des appels persistants à corriger des injustices graves ou si aucun recours juridique n’est possible, ou bien encore si des structures politiques non démocratiques ne permettent pas un accès aux moyens normaux pour corriger ou réformer, des situations exceptionnelles font que, dans certaines limites, la ‘désobéissance civile’ est justifiée », peut-on lire dans ce texte.
Dans la conférence de presse qui a suivi la publication de cet appel, le P. Michael Yeung, vicaire général du diocèse, a insisté pour dire que l’Eglise ne faisait qu’appeler toutes les parties à « dialoguer » et qu’elle ne militait pas pour des actions de désobéissance civile, lesquelles risqueraient de « diviser la société ». Mais, pour ceux qui à Hongkong et à l’intérieur de l’Eglise doutaient de la volonté de l’actuel évêque du diocèse, Mgr John Tong Hon, de réaffirmer la nécessité d’une réforme politique à Hongkong, l’appel du 25 juillet montre que Mgr Tong « suit la voie ouverte par Mgr Zen » et que l’actuel évêque de Hongkong « redit avec force et détermination, même si c’est d’une manière plus discrète, plus prudente et plus nuancée, ce que disait son prédécesseur », confie à Eglises d’Asie un prêtre du diocèse.
Les partisans de Pékin ne s’y sont d’ailleurs pas trompés et plusieurs d’entre eux ont appelé Mgr Tong et le diocèse au silence. « Le territoire [de Hongkong] jouit de la liberté d’expression et de religion, mais un responsable religieux ne devrait pas, au motif de ‘se conformer aux enseignements de sa religion’, appeler ouvertement ses fidèles à rejoindre le mouvement Occupy Central et à enfreindre la loi », a commenté Wong Kwok-hing, de la Fédération des syndicats de Hongkong. L’Eglise « déforme les faits. Les gens doivent faire attention dans ce contexte où l’on voit l’atmosphère politique se radicaliser », a réagi Chan Kam-lam, de l’Alliance démocratique pour l’amélioration et le progrès de Hongkong, un parti pro-Pékin.
En réponse le P. Michael Yeung a simplement renvoyé ceux qui critiquent l’appel du 25 juillet au texte original, lequel, a-t-il souligné, s’appuie sur l’enseignement du Catéchisme de l’Eglise catholique. « L’appel ne se concentre pas sur le fait de savoir s’il faut ou non soutenir Occupy Central. L’Eglise a pour principe de ne pas intervenir en politique ; elle vise à promouvoir la valeur universelle que représente des élections démocratiques », a indiqué le vicaire général.
(Source: Eglises d’Asie, 29 août 2013)