VIETNAM

Les habitants de Côn Dâu ont reçu l’ interdiction d’enterrer leurs morts dans le cimetière de leur paroisse

Eglises d'Asie, mercredi 21 avril 2010 - Une dépêche émanant du village de Côn Dâu, dans le diocèse de Da Nang, mise en ligne dans l’après-midi du 20 avril (1), annonce l’imminence d’une opération de grande envergure, menée par les autorités municipales de Da Nang sur le cimetière de la paroisse. Cette opération est destinée à « libérer » (giai toa) le cimetière, c’est-à-dire à le transformer en terrain à construire. Elle est menée dans le cadre de la récupération intégrale par les autorités locales des terrains cultivés et construits de cette paroisse de 2 000 habitants pour laisser la place à une zone urbaine dite « écologique », édifiée grâce aux investissements étrangers.

Le cimetière paroissial d’une superficie d’environ 10 ha se situe à environ 1 km de l’église. C’est là que repose l’ensemble des paroissiens décédés depuis la création de la paroisse, il y a 135 ans. Il avait été inscrit par le pouvoir central sur la liste des sites historiques à protéger.

Une première alerte avait été donnée, il y a une dizaine de jours, dans la matinée du samedi 10 mars. Une dizaine d’agents de la sécurité avaient pénétré dans le cimetière de la paroisse. Ils y avaient installé une pancarte avec l’inscription: « Interdiction absolue d’enterrer des morts en ces lieux ». Le poteau supportant la pancarte ayant été enfoncé à même la tombe des parents d’un fidèle de la paroisse. Celui-ci, âgé de plus de 70 ans, a fait entendre de vigoureuses protestations. L’officier du groupe a déversé alors, à quelques centimètres de son visage, le contenu d’une cartouche de gaz lacrymogène. Le fidèle protestataire a immédiatement perdu connaissance et est tombé à la renverse.

Averti de l’incident, environ un millier d’habitants de Côn Dâu se sont alors précipités au cimetière pour protester avec fougue contre l’intervention barbare des agents de sécurité. Ceux-ci se réfugièrent alors dans une des maisons du village. La foule les a obligés à appeler une ambulance et à signer un procès-verbal des faits avant le départ du blessé vers le service des urgences de l’hôpital où il se trouve encore aujourd’hui. A la suite de cet incident, les paroissiens avaient mis en ligne sur Internet un récit des faits intitulé « Des morts appellent au secours ! »

Une semaine auparavant, un fonctionnaire du Front patriotique, accompagné de deux membres du bureau régional des Affaires religieuses était venu trouver le curé de la paroisse pour lui demander d’avertir les fidèles que, désormais, les inhumations étaient interdites au cimetière. Le prêtre s’y était refusé, affirmant qu’il s’agissait là d’une des deux propriétés que la population possédait en commun, à savoir l’église et le cimetière. Des documents existaient, qui l’attestaient expressément. Lui-même n’avait aucun pouvoir sur ce lieu et les agents de la Sûreté devaient réunir la population pour en discuter.

Des rumeurs courent, selon lesquelles pour préparer cette opération, les autorités auraient loué les services d’un certain nombre de personnes des agglomérations voisines (30 000 dôngs chacune) pour venir manifester sur place le jour de l’intervention. Pour sa part, la population de Con Dâu qui, dans sa grande majorité, refuse toujours l’expertise de ses maisons et de ses propriétés par les agents municipaux, se prépare à résister dans la non-violence et la prière et à protéger le lieu de repos de ses ancêtres.

Dès qu’ils ont eu connaissance du projet de la municipalité de Da Nang de les exproprier de leurs terres et de leurs habitations, les fidèles de Con Dâu, dans leur grande majorité, se sont toujours opposés au projet. A plusieurs reprises, l’année dernière et au début de cette année, le haut responsable du parti communiste pour la ville de Da Nang, Nguyen Ba Thanh, est venu sur place pour essayer de les persuader. A partir du 27 janvier, la pression des autorités sur la paroisse s’est faite plus violente et les esprits se sont échauffés. Le haut responsable communiste a même menacé d’envoyer ses bulldozers raser la paroisse au mois de mai (2).

(1) Mise en ligne sur le site de l’agence VietCatholic News des faits repris du site des rédemptoristes vietnamiens.

(2) voir EDA 523, 525